Les ordonnances Macron : un projet antisocial et antiféministe


  • Le concept de l'ordonnance :

Non, ce n'est pas comme une prescription de pilule. C'est plutôt une manière de faire avaler au Parlement la couleuvre de l'ultralibéralisme sans s'embarrasser des gen-te-s qu'on vient à peine d'élire. En gros, Macron fait voter une « loi d'habilitation » : pendant une durée déterminée (ici un an), il peut légiférer sur un domaine particulier sans que le Parlement ait son mot à dire. Merci la séparation des pouvoirs, bye bye c'était sympa d'être venue.

  • La « flexibilité », c'est la sécurité.
Et ton père, c'est Musafa du roi lion ? Sur le ton de « le chômage c'est la faute au code du travail », et les « licenciements, c'est la faute aux ouvriers » (on ne parle pas des ouvrières, hein, de toute façon il faut croire qu'elles n'existent pas pour la Team Macron). Dans le même style, il y a aussi « Pauvres patrons en difficulté », etc etc. Bref, il est temps de revenir à quelques bases sur le plan économique :
  • Pouvoir licencier plus facilement, c'est pouvoir licencier plus facilement. Ce n'est pas réduire le chômage, au contraire c'est l'augmenter. Et depuis l'année dernière et la première mouture de la « loi travail », observe-t-on une baisse du chômage ? Eh ben non. Ce n'est pas difficile de licencier en France, déjà. Et les autres lois de « flexibilisation » du marché du travail ne fonctionnent pas non plus.
  • La flexibilité du temps de travail c'est des horaires variables, qui nuisent à la vie personnelle (comment s'organiser pour sa vie familiale, associative, militante quand nos horaires de travail varient constamment, quand il faut s'adapter aux besoins du patronat?). C'est aussi le recours encore plus important au travail fractionné : être payé.e 2H puis ne plus être payé.e pendant 1H (sans avoir le temps de rentrer chez soi) puis être à nouveau payé.e le soir... C'est aussi devoir travailler plus longtemps sans être payé.e plus : les entreprises ont toute latitude pour modifier la durée hebdomadaire du travail sans nécessairement augmenter les rémunérations. Sympa. Et donc vlan, plein d'heures supplémentaires difficiles à refuser. Heures supplémentaires, qui, c'est bien connu, réduisent le chômage... (ironie, mon amie).
  • Et quel.le.s salarié.e.s vont se voir imposer le plus des horaires non-désirés en entreprise ? Hein ? A votre avis ?

  • Les accords d'entreprises et les référendums d'entreprises qui priment...
L'inversion de la hiérarchie des normes, c'est qu'au lieu que ça soit la loi qui décide pour tout le monde, et qu'une décision prise au sein d'une entreprise ne peut pas être défavorable aux salarié.e.s : c'est ce qui est le plus favorable aux salarié.e.s qui prime toujours. Une bonne façon de reconnaître l'asymétrie de pouvoirs et d'informations entre patron.ne.s et salarié.e.s. Avec le projet de Macron, on fait exactement l'inverse : un référendum d'entreprise peut influer sur les droits des salarié.e.s au mépris de la loi. Concrètement cela signifie qu'un patron.ne peut contourner allégrement les syndicats et les représentant.e.s du personnel. Le référendum, ça paraît quand même pas mal non ? Eh ben dans la pratique c'est pas si démocratique : les patron.ne.s peuvent facilement, à l'échelle d'une entreprise, faire pression pour faire voter dans tel ou tel sens. Beaucoup n'hésitent pas à faire du chantage à l'emploi. Ca a déjà commencé avec la loi El-Khomri : par exemple les salarié.e.s d'une usine de Moselle ont accepté en juin 2016 de travailler 39h payées 37h. Merci qui ?
  • La suppression du comité d'hygiène et sécurité
Là encore, ce qui relève de la loi actuellement relèverait ensuite de la négociation au sein de chaque entreprise. Au lieu donc de prendre en compte des métiers pénibles et peu reconnus (comme les caissières et leurs tendinites à répétition), au contraire, on détricote les protections. Merci qui ?

Aujourd'hui, les femmes sont en moyenne payées 26% de moins que les hommes. Ce sont les premières à subir le temps partiel imposé, et elles effectuent 66 % du travail domestique en moyenne : soit donc une double journée de travail. Qui devra arrêter le travail au détriment de son autonomie sociale et économique parce que le salaire féminin sera plus encore qu'aujourd'hui considéré uniquement comme un « salaire d'appoint » ? Culturellement, les filles et les femmes sont éduquées pour moins revendiquer, refuser le conflit, et du coup accepter ce qui n'est pas forcément acceptable. Qui a été socialement éduquée pour fermer sa gueule (même au sein des syndicats) ? Qui travaille prioritairement dans les métiers du care, des soins à la personne non-reconnus, sous-payés, et pénibles physiquement et mentalement ? Qui donc va prioritairement pâtir des ordonnances Macron ? Sans suspense, les femmes, et les femmes ayant un statut précaire, celles étant racisées. Et celles en CDI ne vous réjouissez pas trop vite hein.

Qui doit donc décider de nos conditions de travail ? Macron, qui n'a jamais mis les pieds dans une usine sinon pour prendre des selfies avec des « ouvrières pour beaucoup illettré.e.s » ? Gattaz, le chef du MEDEF qui est ra-vi des propositions de Macron ? Ou nous-mêmes en nous organisant et en rejoignant les initiatives pour protéger ce qui reste du code du travail ?


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