25 novembre : le patriarcat nous tue

Le patriarcat nous tue. 

Des hommes nous tuent. 

Chaque jour, partout dans le monde, des femmes sont tuées par des hommes parce qu'elles sont des femmes. Tous les deux jours une femme est tuée en France, le plus souvent des mains de son partenaire ou ex-partenaire. Tous les deux jours en France un homme tue sa compagne ou son ex-compagne, se fait l'auteur d'un féminicide. 

D'autres responsabilités cependant existent. Ces femmes sont tuées par l'inaction des institutions qui par leur manque de volonté pour agir participent activement à ces meurtres. A ce jour et depuis le 1er janvier 2019, on comptabilise 138 femmes tuées par leurs conjoints ou ex-conjoints. Ce compte militant est "a minima". D'autres personnes ont été victimes mais échappent au comptage, d'autres femmes parmi lesquelles des femmes trans, et des femmes en situation de prostitution/travailleuses du sexe qui n'entrent pas dans ces chiffres. 

Aujourd’hui, 25 novembre, journée internationale pour l’éradication des violences faites aux femmes, nous avons choisi à Lyon de rendre visible l’absence de ces 138 femmes tombées dans cette guerre que le patriarcat nous mène, aujourd'hui encore, comme hier, en France et partout ailleurs. 



Ces chaussures sur les marches de la Cour d'appel de Lyon représentent chacune d'elles. Le choix de ce lieu n’est pas anodin. La justice de notre pays, comme la police, comme l’école, comme toutes les institutions représentant l’État, ne remplit pas ses missions, elle n'assure pas son devoir de protection envers les femmes et les filles. De nombreuses enquêtes le démontrent, y compris celles menées par la justice elle-même. A titre d’exemple, citons celle conduite en 2018- 2019 dans la région d’Aix-en-Provence où plus de la moitié des auteurs de féminicides identifiés avaient déjà été condamnés pour des violences conjugales (Le Monde, 16/11/2019). Notons également qu'actuellement, les juges de France rejettent 40 % des demandes d'ordonnances de protection formulées par les femmes et leurs avocat-e-s, alors même que cette mesure ne nécessite pas de condamner un individu (Médiapart, 22/11/2019). 

Nous ne comptons plus le nombre de refus de dépôts de plaintes pour violences conjugales par des policiers qui renvoient droit vers la mort des femmes venues demander de l'aide dans un commissariat. Une aide que l'Etat leur doit. L'Etat choisit de tourner le dos à ces femmes. Au mieux ses institutions regardent avec la gêne de leur propre impuissance les victimes prendre toujours plus de coups. Tout cela nous le dénonçons et nous l'affichons. 



Afficher la violence machiste par tous les moyens : sur les murs, sur les réseaux sociaux, lors de rassemblements, lors de la marche massive de samedi, et aujourd’hui devant les magistrat-e-s et la presse. Voilà ce que nous faisons depuis des années, et plus intensément encore ces dernières semaines. 

Afficher ses ressorts et ses causes : la domination économique, administrative, politique, culturelle, psychologique, sexuelle des hommes sur les femmes, l'idée qu'ont les hommes que "leur femme" leur appartient, le droit de vie ou de mort qu'ils prennent sur celle qu'ils sont supposé chérir. Afficher et nommer aussi ceux qui perpétuent ces dominations et les violences de genre, voilà ce que nous faisons depuis des années, et plus intensément encore ces dernières semaines. Les auteurs de violence ne sont pas simplement des individus « déviants », issus des classes populaires, "malades" ou sous l'emprise du chagrin comme on l'entend trop souvent. Leur geste n'est pas un geste d'amour désespéré, et leur acte n'est acte isolé : il est le fruit d'un système. Un système qui, dès la petite enfance, autorise voire encourage les petits garçons à violenter les petites filles, et qui, plus tard, laisse-faire. Ces meurtriers bénéficient de complicités à tous les niveaux de la société : famille, collègues, voisinage, police, justice, jusqu’aux plus hauts sommets de l’État. Les promesses ne suffisent pas, nous demandons des actes, des moyens, une mobilisation concrète de long terme. 

Aujourd’hui, le gouvernement réduit ou stabilise les financements pérennes et déjà insuffisants des associations en dépit du Grenelle et d'une prétendue "grande cause nationale du quinquennat". En fait de Grande cause, c'est une simple politique d'affichage qu'on nous présente, sans aucun acte ni aucune mesure concrète. 

Ce gouvernement préfère envoyer sa police interpeller celles qui, la nuit, collent sur les murs les noms des victimes de féminicides. 

Ce gouvernement préfère stigmatiser les femmes portant le voile. 

Ce gouvernement préfère multiplier les lois racistes contre les migrant-e-s. 

Ce gouvernement préfère fragiliser encore plus les retraites des femmes et les rendre encore plus pauvres qu'elles ne le sont déjà. 

Ce gouvernement préfère s'attaquer à l'ensemble des droits sociaux et aggraver les inégalités par des mesures qui touchent en premier lieu les femmes. 

Face aux violences patriarcales, face à l'inaction complice de l'Etat , contre ses actions complices, nous continuerons de nous battre. Aujourd’hui, nous crions aux femmes notre solidarité. Nous sommes fortes, nous sommes unies et nous continuerons notre lutte contre les violences et contre la précarité économique qui les cimente.


Superféministe/le PF69 et le collectif collages contre les féminicides de Lyon


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