Des sages-femmes qui réalisent des avortements ?
... Cela ne semble pas évident
pour tout le monde. Pourtant elles (et quelques ils peut-être) sont nombreuses
à travailler dans les centres d’IVG. Une enquête de 2007 sur les établissements
et les professionnel-le-s réalisant des IVG (DREES, Etudes et
résultats, décembre 2009) dénombrait déjà 1600 sages-femmes impliquées dans cette activité, soit près d’un tiers du
personnel intervenant dans la pratique des IVG.
Alors
que la prochaine loi de santé prévoit de reconnaître et d’étendre les
compétences des sages-femmes en matière d’IVG, Super Féministe est allée
interviewer la présidente de l’ANSFO, l’Association Nationale des Sages-Femmes
Orthogénistes, Marjorie AGEN, qui est une sage-femme orthogéniste.
Comment est née votre
association ?
Sa création remonte
à 2009, à la suite du rejet d’un article de la loi HSPT (Hôpital Santé Patients
Territoires) qui permettait aux sages-femmes de réaliser des IVG
médicamenteuses. Celui-ci avait été retiré suite à la mobilisation du « Collectif des
sages-femmes de demain », opposé à la pratique de l’IVG
par les sages-femmes. Leur argumentaire est toujours le même, on le retrouve
dans le dernier amendement "pro-vie" déposé par des député-e-s dans le
cadre du projet de loi Santé voté actuellement : « Etendre la possibilité aux
sages-femmes de pratiquer un avortement vient dénaturer leur mission première
qui est de prendre soin de la femme enceinte et de leur enfant avant et après
la naissance ».(Déposé le 2
avril 2015 par M. Poisson, M. Mathis, M. Decool, Mme Besse, M. Moreau).
Comme dans la
population générale, les sages-femmes peuvent être pour ou contre l’avortement.
Il était nécessaire de créer l’ANSFO dans l’idée de défendre le rôle des sages-femmes
dans tout le domaine de la régulation des naissances au sens large.
D’ailleurs les sages-femmes sont bien formées sur ces
questions…
La formation
initiale comprend beaucoup plus de temps consacré à la contraception et à l’IVG
qu’en médecine générale. On peut faire les suivis gynécologiques de prévention
pour toutes les femmes « en bonne santé » (cela veut dire que si on
décèle une pathologie, on doit l’orienter vers un médecin) ; on prescrit
et pose tous les moyens contraceptifs (DIU, implant notamment).
Quelles sont les activités de l’ANSFO?
Depuis 5 ans, nous
avons beaucoup travaillé pour rappeler les compétences des sages-femmes dans ce
domaine, pour contribuer à une réflexion au sein de la profession, pour amener
un peu de féminisme aussi dans tout ça, même si ça ne figure pas dans les
statuts car on veut aussi fédérer tou-te-s les professionnel-le-s concerné-e-s.
Nous participons aux mobilisations pour le droit à l’IVG. Nous faisons le lien
avec les associations féministes (je suis membre de la commission avortement du
Planning Familial par exemple), avec l’ANCIC (Association Nationale des Centres
d’IVG et de Contraception). Nous interpellons le ministère de la santé, nous
intervenons dans des colloques, etc. Nous essayons aussi de développer la
formation. On a un rôle d’éducation populaire de l’orthogénie auprès des
sages-femmes. On met à disposition toute une série de ressources pour les
étudiant-e-s, les professionnel-les : des références d’articles sous forme
d’un Pearl Tree,
des comptes Facebook, Twitter…
Que pensez-vous des annonces du gouvernement concernant la place
des sages-femmes dans l’IVG médicamenteuse ?
Nous sommes
satisfaites car c’était l’une de nos revendications : permettre aux sages-femmes
de réaliser des IVG médicamenteuses, officialiser notre pratique hospitalière,
offrir ses soins en libéral. Par contre pourquoi s’arrêter là ? Nous
revendiquons aussi de pouvoir réaliser des IVG chirurgicales. L’aspiration,
c’est un geste qui n’a rien de compliqué, et nous connaissons l’utérus par
cœur. Nous demandons aussi la possibilité de réaliser la 1ère
consultation préalable à l’IVG, l’entretien pré-IVG, et la consultation
préalable à une demande de stérilisation volontaire.
Et bien merci !
Vous trouverez plus
d’infos sur l’ANSFO en allant sur leur site, qui contient plus de 9000
références, des textes de loi, des liens, etc…
http://www.sages-femmes-orthogenistes.org/ansfo/